- 10 septembre 2013
- Yeepaa
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Le Turn est à mon sens l’angulaire des spots au PLO ! En effet, non seulement on a une idée très précise de ce que l’on détient/va pouvoir obtenir qu’il est très important d’aborder cette street avec solidité et perspicacité.
Préambule
Par solidité, je ne dis pas de passer en check/fold si l’on n’a pas trouvé une main forte mais plutôt de bien appréhender où on se situe, les spots de bluffs se font sur cette street (ou se construisent/finalisent pour la river) et tout ce qui est sizing entrainera soit une FE proche de 0 pour la fin du coup soit un play développer ayant un sens.
Je ne parle pas évidemment des coups où quasiment tout est parti sur le flop et où le résiduel de stack ne laisse d’autres choix que de fold sur la moindre mise (à condition de « savoir » que l’on est battu) ou d’envoyer le reste de nos jetons au centre.
Typiquement, si je devais garder un seul conseil pour le play au turn, ce serait « bet/fold est bien plus fort que check/fold ».
Les options et les stacks
Le principe est de bien jauger et d’affiner ce avec quoi notre adversaire va nous avoir call (dans le cas où nous sommes l’agresseur) au flop et ce que la carte arrivant va lui apporter et dans quelle mesure elle impact le range que nous représentons/avons.
La position aura comme pour tout le déroulement du coup une importance capitale et les stack sizes, peut être encore plus.
La taille de notre tapis va conditionner énormément d’éléments pour la fin du coup, si on mise et que le coup s’arrête ici, c’est une bonne affaire (sauf à avoir nuts absolu et incassable, rare cas où on aimerait que le vilain aille jusqu’au bout de son dernier denier) ! Si par contre il reste de la profondeur, il faut estimer quelle mise va pouvoir nous apporter de la FE de suite mais aussi face à un adversaire très collant qui va pédaler ses tirages jusqu’au bout du monde, quelle mise va nous permettre de balancer entre prendre de la value quand on est fort sur ce spot mais aussi pour garder une ligne cohérente/équilibrée comment cette même mise va nous permettre de garder une charge suffisamment importante pour lui faire passer une équité meilleure que la notre sur la river.
Prenons un exemple :
Nous sommes ici au bouton avec une main pleine de potentielle. Nous avons trouvé un flop superbe puisque nous jouons 7/6/5 pour nut straight et les cœurs pour un FD (ici les tendances du joueur contre qui nous sommes définiront si nous la jouerons comme nut ou pas, mais le sujet n'est pas là) - nous avons aussi le 5 de cœur qui nous donne quinte flush.
Ici pour l'instant on ne va pas parler d'équité ou de range chez notre adversaire mais de taille de stack qui va induire une taille de mise. On va seulement dire que l'on aura à l'abattage si toutefois on y va la meilleure main 1/3 ici (je vous laisse faire des simulations)
Nous avons une main potentiellement forte qui peut se concrétiser (on parle de réalisation de l'équité) ou bien nous pouvons complètement passer à travers.
Cas A
Le pot fait 90 et notre adversaire (que nous couvrons largement) détient encore 105.
Si nous bettons a pot pour maximiser notre FE, nous lui demandons d'avoir 33% d'équité pour trouver ce qu'il cherche (si tant est qu'il cherche quelque chose) sur la river.
Mais si nous sommes payés ici et que nous ratons nos outs, nous allons avoir constitué un pot qui va faire 270 avec 15 en réserve chez notre adversaire ! Que lâchera t'il river avec une telle cote ? il faudrait vraiment qu'il est absolument tout raté et n'est même pas une paire en main pour qu'il trouve le bouton fold ici et nous pourrions nous retrouver avec une maigre paire de 7 à l'abattage.
Cas B
Le pot fait toujours 90 mais cette fois notre adversaire, qui est toujours couvert par notre stack détient encore 220 en réserve.
Encore une fois l'option du bet pot est envisageable avec si l'adversaire call un pot de 270 mais il aura toujours 130 en tapis sur la river et pourra peut être trouver un fold mais là encore il faudra qu'il n'est qu'une main fort moyenne/faible pour ne pas trouver le call dans un pot qui fera après notre mise et son call : 530, il lui faudrait donc 130/530 avoir la main gagnante à peine une fois sur quatre pour que son call soit profitable.
Nous pouvons voir une réelle différence entre les plays qui vont s’arrêter au flop et ceux qui doivent se dérouler sur plusieurs streets, et comme l’option que nous allons prendre sur le turn va impacter la fin du coup.
Le fait de commit ou non notre adversaire va nous ouvrir des voies vers des bluffs que nous ne pourrions envisager si nous bettons systématiquement à pot.
Si dans le cas A, le résiduel de stack de vilain amène de toute façon un commit évident même si nous misons 60-70% du pot, dans le cas B, le fait de miser cette même portion (entre 55 et 70 par exemple) va laisser une mise suffisante (en terme de stack effectif) pour lui faire passer une part non négligeable de ses mains qu’il ne va pas améliorer par la suite.
Les équités et le bluff
En terme d’équité pure et dure, le turn est aussi la street sur laquelle on va ou non trouver des outs de backdoor et aussi pourvoir construire un play sur des outs fantômes de façon bien plus forte que sur le flop. Envisager toutes ces options sur chaque décision rendra notre réflexion et nos plays bien plus fort. Si l’on cumule cela avec une certaine compétence dans le hand reading et le profilage des adversaires, on s’apercevra que le turn est l’angulaire d’un coup développé au PLO.
Ici, nous trouvons un BDFD, certes 7 high mais le fait qu’il soit en backdoor le rend moins probable chez notre adversaire et nous apporte un regain d’équité avec 9 outs supplémentaires ce qui fasse à un FD supérieur et DP en mains comme Td 8d Jh 9h nous donne toujours dans les 38% d’équité sur cette turn alors que si on trouve le Jd on aura péniblement 22% de chance (contre cette même main exemple).
Nous voyons aussi a quel point les backdoors peuvent nous apporter des chances supplémentaires de remporter le coup et aussi dans quelle mesure ils vont nous apporter des cartes qui sont bonnes à barrel en semi bluff profitable.
Ce qu’il va être très important à prendre en compte pour pousser un bluff sur le turn va être :
- Les stacks sizes (ne pas commit un joueur sur le turn pour avoir des options plus tard)
- Les tendances de vilain (son went to showdown qui va nous permettre d’estimer sa stickytude – sticky = collant)
- Notre équité face à un call – bluffer avec 0 d’équité ou presque n’est que trop rarement une bonne option au PLO
- Un équilibrage de nos plays (on peut penser que c’est inutile avant certaines limites, mais construire un jeu par son thinking process et adapter aux profils est et reste de toute façon un play gagnant sur le moyen/long terme)
Les équités, la value et le vol d’équité
Conservons le ca de figure illustré ci avant avec un flop qui nous apporte le BDFD à pique. Mettons maintenant une main relativement forte chez notre adversaire avec le NFD, une OP (AA) et le top pair du board qui va réduire les possibilités de top set chez nous.
Vilain a :
Face à une telle main, qui est relativement forte nous avons plus de 40% d’équité, nous bloquons des outs du FD en retirant nous-mêmes 2 outs et en prenant pour nous le 5 de cœur qui nous ferait quinte flush.
Avec notre second FD qui arrive sur ce turn, nous avons comme évoqué plus tôt un gros up de notre équité.
Là, on est en situation main connue, ce qui n’est évidemment pas le cas ingame. Donc, ici si on prend le coup depuis le début :
Imaginons :
UTG relance préflop, nous sommes le seul à payer avec cette main a potentielle et avec la position.
Flop, UTG Cbet et nous relançons, fort de notre équité et en semi bluff puisque nous n’avons pas de main faite mais de grosses possibilités d’amélioration. Avec dans tous les cas une équité qui sera réelle (face à la main attribuée à notre adversaire nous aurons dans les 45% au flop). Vilain paye et donc le turn nous apporte notre backdoor flush à pique.
UTG check devant nous sur le turn et nous misons légitimement et en poursuivant notre agression. Ici, le fait que notre adversaire détienne le tirage couleur max doit le faire réfléchir avec quoi nous avons relancé au flop puisque le tirage le plus fort est dans sa propre main. Nous pouvons évidemment avoir 765 avec 2 cœurs et nous sentir fort sur le spot mais pour autant en position ne prendrions nous pas l’option du call plus souvent face à un possible FD qui nous domine en situation de SPR élevé ?*
Il va devoir donc prendre un spot sur lequel il va devoir estimer ses chances face à set/DP et potentiellement des bloqueurs sur son tirage couleur. Face a un range set/paire + GS+FD/DP+GS+FD, il va se retrouver avec moins de 30% d’équité. Sera-t-il disposé a pousser le coup plus loin ? Ici, les tendances que l’on connait de lui et le metagame entre évidemment en ligne de compte ! si il nous perçoit comme un bluffeur patenté, le fait de pousser le coup sur une carte comme le valet de carreau ou tout autre carte ne nous ouvrant pas de backdoor peut être un spew, par contre si nous avons une vision assez sure de ce qu’il va faire (call turn et check/fold river sur un blank), le fait de continuer sur cette street sera surement la meilleure option. Il faut toutefois garder en tête que sur une carte hors pique pour un BDFD, notre équité sera trop faible pour partir à tapis sur le turn et nous serons dans une situation de bet/fold typique.
Là aussi, les sizings et l’équilibrage sont importants, il nous faut balancer nos plays à l’identique ici avec top set ou un draw et les sizings doivent être cohérent pour ne pas nous rendre nous même exploitable.
Si nous réussissons à le faire passer sur ce turn (qu’elle soit à pique ou non), nous aurons volé l’équité réelle de notre adversaire, grâce à la position notamment mais aussi de part nos lectures et plays en termes d’agression et de sizings.
Nous verrons dans la prochaine partie les différentes actions selon les positions et les actions préalables, bet (donk ou cbet)/check/fold.
*: Le fait que nos adversaires ne soient pas forcément « aware » sur le concept d’équité, d’EV et de SPR ne doit pour autant ne pas nous priver de nous appuyer dessus pour nos propres plays. L’adaptation est une chose mais jouer par mimétisme face à des joueurs incompétents est une catastrophe.