Introduction au jeu short stack en PLO

Introduction au jeu short stack en PLO

34badbeat34 a été l'un des membres récompensés lors de la promotion "meilleurs articles du mois". Il vous présente une façon optimale d'aborder le jeu short stack 40 bb en PLO et ainsi y trouver un edge.

Le fait de jouer avec un tapis incomplet en PLO est assez peu discuté ou analysé. Cela est même considéré comme un signe de faiblesse ou d'incompétence par la plupart des Regs et des bons joueurs. Si l'adage «ce joueur n'est pas cavé max, donc c'est un fish » est souvent juste, c'est que la plupart des joueurs assis avec un petit tapis sont inexpérimentés, font toutes les erreurs classiques des débutants en PLO, et de surcroît jouent comme quand ils ont un tapis profond, sans procéder à des adaptations stratégiques.

En réalité, il existe des stratégies spécifiques au jeu short stack, et celles-ci lorsqu'elles sont correctement appliquées peuvent vous permettre non seulement d'être un joueur gagnant, mais aussi d'être assez peu exploitable par les bons joueurs, surtout s'ils continuent à ne pas se méfier de vous à cause de votre petit tapis et ne font pas l'effort de procéder à quelques adaptations.

Pourquoi jouer short stack en PLO

Cela permet une phase d'apprentissage intéressante. Elle est donc assez adaptée pour les joueurs débutants ou intermédiaires et ce pour plusieurs raisons.

Les erreurs coûtent cher au PLO et le PLO est un jeu complexe où l'on peut facilement faire des erreurs. Jouer avec 40bb permet de minimiser l'impact financier de vos erreurs. De plus, une partie des erreurs que vous ferez deviendront des petites erreurs plutôt que de grosses erreurs. La raison en est simple. Les écarts d'équités étant moins marqués qu'au Holdem, votre besoin d'équité par rapport à votre stack aura des écarts plus faibles. Si par exemple, vous envoyez votre stack avec une overpair + un backdoor flush et un tirage quinte par les deux bouts, vous le ferez toujours avec un SPR faible du fait de la taille de votre tapis, transformant votre move en une erreur EV- uniquement si vous faites face à un brelan. Mais même dans ce cas-là, comme vous pouvez le voir dans l’illustration ci-dessous, votre petit tapis transforme cette erreur en une erreur plus marginale en terme de big blind perdues que si vous êtes avec un tapis à 100bb et un gros SPR.

Dans cet exemple si vous avez 3bet, le pot fera environ 20bb et il vous restera un stack de 30bb.Vous envoyez vos 30bb avec overpair + backdoor flush et OESD pour un pot qui fera 80bb. Face au brelan max, votre EV n'est que marginalement négative du fait d'un SPR de 1,5.

EV = (80/100) x 33,21 = 26,5 – 30 = -3,5bb

Le jeu short stack permet d’apprendre des notions essentielles communes au jeu avec un petit tapis comme au jeu plus deep, telles que la force brute des mains, leurs jouabilités, vos équités au flop en rapport à la taille du pot. Cela vous permet de progresser dans votre apprentissage du PLO. C'est donc particulièrement adapté pour un joueur avec des compétences et une expérience modeste.

Nous verrons plus loin qu'il faut jouer moins de main qu'en deep stack. Cela peut donc laisser plus de temps pour étudier la façon de jouer de vos adversaires. Vous pouvez prendre des notes pendant la partie ou lorsque vous revoyez vos mains avec un replayer. Le jeu short stack se jouant préflop ou au flop essentiellement, vous aurez aussi moins de paramètres à analyser sur vos adversaires, rendant la prise de note et son utilisation plus facile.

Enfin, et c'est un aspect assez peu mis en avant, le jeu short stack est une option intéressante pour le winrate et la croissance de Bankroll pour les joueurs peu expérimentés, qui bien qu'appliqués peinent à être gagnant ou le sont à la marge. En effet, il n'est pas rare pour ce type de joueur d'avoir un winrate que légèrement gagnant, disons entre 0 et 5bb/100. Avec la variance et les gros swings inhérents au PLO, cela peut être décourageant. Un bon jeu short stack, assez facilement assimilable, peut générer un winrate supérieur, comprit assez facilement entre 5 et 10bb/100, voir entre 10 et 15bb. Outre que cela fait grossir plus vite votre BR, cela encourage à persévérer et à apprendre. Vous pouvez aussi l'utiliser comme un accélérateur de BR en montant de limite plus facilement. Si vous avez 100€, et que vous avez une gestion stricte de BR à 50 caves, vous jouez en PLO2. Avec la même gestion de BR, mais en mettant le tapis minimum, vous pouvez jouer en PLO5. Si vous gagnez du 10bb/100 en PLO2 en étant cavé max, et faites aussi du 10bb/100 en short stack en PLO5, vous ferez grossir votre BR bien plus vite.

 

Les limites du jeu short stack en PLO

Ce type de jeu ne présente pas que des avantages, c'est pourquoi je conseillerais de mixer les sessions. Bien que permettant l'apprentissage de certaines notions du PLO, il manque des points importants de cette variante, que le jeu en petit tapis ne permettra pas d’appréhender. Par exemple, vous progresserez peu sur les spots de bluff et la fold équité, puisque vous serez plus souvent payé. Le calcul des cotes implicites est quasi inexistant avec cette profondeur, élément à maîtriser aussi au PLO. Enfin, tout ce qui relève du jeu au turn et à la river vous seront assez étranger dans la mesure où la plupart du temps vous enverrez votre stack préflop ou au flop. Bref, il manquera des cordes à votre arc de joueur confirmé de PLO.

Autre désavantage du jeu short stack, ne prendre que 40bb à l'adversaire lorsque celui-ci fait plus d’erreur que vous. C'est une perte de value qui milite pour le jeu deep dans cette situation.

Enfin, un inconvénient majeur est la difficulté à trouver des tables vraiment favorables, ou du moins idéales pour cette stratégie, ne permettant pas de faire un volume important.

Principes généraux et sélection des mains

Majoritairement vous voyez en micro limite des shorts stacks qui jouent de deux façons. Soit le classiquement trop large des joueurs de micro avec la même sélection de main qu'avec 100bb, soit l'ultra agro et ultra large dans une optique de type loto, pour passer rapidement à 100bb et martyriser la table. Ces deux approches ne sont pas adaptées.

En effet, une des caractéristique des micros et basses limites en PLO est que de nombreux joueurs sont larges préflop et collants au flop. La plupart des pots, sauf ceux 3bet et 4bet, et encore, sont disputés par la moitié ou les 2/3 de la table. Ainsi en étant short stack, vous jouerez majoritairement des pots multyway, avec une fold équité faible au flop. Par conséquent, vous irez souvent à l’abattage quand vous décidez de vous engager pour votre tapis dans un pot. C'est alors la force de votre main qui fera de vous un joueur gagnant ou perdant.

Prenons un exemple. Un joueur très large ouvre à 3bb en milieu de position, vous payez au bouton avec AK86ss, et les deux blinds payent. Voici un pot de 12bb dans lequel vous avez investi 7,5% de votre stack initial de 40bb. Il vous reste 37bb et vous devez avoir au moins 44% d'équité au flop pour engager le reste de votre tapis profitablement. En réalité, vous n'aurez vos 44% d'équité face à des mains aléatoires que dans environ 20% des cas. Par conséquent, sur 80% des flops vous devrez passer. Mais le plus important c'est que vous n'aurez une équité forte, égale ou supérieure ici à 60%, sur à peine 10% des flops. Or, c'est sur les situations où vous avez un fort avantage d'équité que vous pourrez compenser les 80% de fois où vous abandonnez votre investissement préflop. Et pour finir gagnant, il vous faut faire mieux que juste compenser les big blinds perdues. Donc si jouer cette main est standard avec un stack à 100 en ayant la position et de la FE, à 40bb c'est un fold tout aussi standard sur une table large et collante.

Omaha Hi Hand vs. Hand Equity Graph

10000 flops dealt 

Minimum Equity for AK86$ss (vs. [100%], [100%], [100%]) 

                          

 

 

 

 

 

 

En jouant large ou très large vous ne rentabiliserez pas assez vos mains fortes dans la mesure où vous ne prendrez à vos adversaires qu’une partie de leur stack, pour compenser ce que vous perdrez avec vos mains faibles. Comme le plus souvent vous n’aurez qu’une équité moyenne au flop, vous devrez soit abandonner le coup en ayant mis entre 5 et 20% de votre stack préflop, soit gamble pour votre tapis sans avoir un avantage significatif. Au mieux vous serez à jeu en jouant de cette façon, le plus probable est de finir perdant, voir gros perdant. Pour ne pas trop perdre avec vos mains faibles, il vous faut les folder.

Maintenant prenons une main un peu plus forte. Toujours la même situation que décrite plus haut dans un pot en 4 way avec un pot de 12bb au flop, mais avec AKT9ds. Vous aurez 30% de flop vous donnant 45% d'équité, et surtout vous atteindrez les 60% dans presque 15% des flops. Avec une main comme AQQTss vous aurez un peu moins de flop vous donnant 44% d'équité, mais un peu plus vous donnant 60% ou plus. Mais avec une main encore plus forte comme AKKJds, 40% des flops vous donnent vos 44% d'équité requise, et les 60% d'équité sont atteints dans 23% des cas.

Omaha Hi Hand vs. Hand Equity Graph

10000 flops dealt 

Minimum Equity for AKKJ$ds (vs. [100%], [100%], [100%]) 

Par conséquent, le jeu short stack impose de jouer des mains fortes à des tables ou les joueurs ont un éventail de main bien plus large, et de les rentabiliser au mieux en emmenant vos adversaires à l’abattage quand les flops le permettent, ou parce que vous êtes à tapis préflop.

Ainsi, ce que vous cherchez à faire en étant short stack est de partir à tapis préflop avec une main qui a un avantage d'équité. Le cas le plus évident est d'être à tapis en HU avec AA. Mais il y a en a d'autres. De très bons rois connectés et single ou double suités sont suffisants pour 4 bet shove face à un maniak avec un taux de 3bet délirant, disons 25%, dès lors que vous jouerez le coup en HU. Un petit rundown double suité est assez souvent favori contre deux joueurs avec des grosses paires. Encore, 4 cartes hautes ou moyennes double suitées et connectées même avec un gap ont une bonne équité face à 3 joueurs. Les trois tableaux ci-dessous montrent ces situations où l'on a une espérance de gain positive avec plus de 50% d'équité face à un joueur, plus de 33% face à deux ; et plus de 25% face à trosi adversaires.

 

 

Comme vous n'aurez pas toujours des situations de all-in préflop, les autres situations que vous recherchez à jouer sont d'aller voir un flop avec des mains qui vous donnent une très grosse équité quand vous touchez votre flop pour un % de votre stack qui soit en relation avec la cote de l’événement de toucher le flop attendu. Par exemple TT88ds en HU pour un quart de votre stack, ou toujours en HU une main bien compacte et suitée face au 3bet d'un adversaire qui ne 3bet que AA, pour moins de 30% de vos jetons. Le jeu postflop est lui tourné vers la maximisation de vos gains quand vous avez une grosse équité. Votre préoccupation principale devra être de trouver la meilleure ligne pour emmener un ou des adversaires à l’abattage. Les options sont variables, en fonction du jeu de vos adversaires, mais globalement il vous faudra miser vos mains fortes face à des joueurs passifs et/ou collants et à l'inverse prendre le plus souvent l'option du check-raise contre les joueurs agressifs, afin de rentabiliser au maximum. 

La question du niveau requis d'agressivité pour jouer en short stack est une question qui n'a pas une réponse simple. Contrairement à la sélection des mains, où l'approche serrée est de loin la meilleure, il y a au moins deux approches pour l'agressivité, une nettement agressive, et une semi-agressive. La première est plus centrée sur l'idée de pousser au maximum les avantages d'équités, même moyens et sera orientée autour d'un taux de 3bet bien plus important, d'open raise max à 3,5bb pour créer de la masse, d'être presque toujours à l'initiative, et d'avoir un peu de FE. La seconde tire surtout sa force de l'agressivité des autres, laisse souvent l'initiative de l'agression à l'adversaire pour avoir un levier pour envoyer son tapis. retournant contre eux leur agressivité, et fait beaucoup moins intervenir la FE. 

Donnons un exemple pour illustrer cela avec une même main. Vous êtes UTG+1 avec AKKTss à une table large agro. Vous pouvez décider de pousser votre main en OR à 3,5 (soit 9% de votre stack) et compter sur un joueur LAG pour vous relancer avec l'intention de shove. Si un joueur s'intercale avant le 3bet, ou si un joueur call le 3 bet cela constituera de la dead money qui rendra votre coup EV+ sauf les fois ou ferez face aux as. Mais AA ne représentera qu'une partie du range du 3better, rendant vos KK rentables. Le désavantage de cette façon de jouer votre main, c'est qu’elle augmente votre variance, dans la mesure où vous poussez 40bb à chaque fois que vous pensez avoir un avantage, même léger.

Un autre plan de jeu est de faire un mini open à 2bb (un limp peut être correct dans certains cas), pour 5% de votre stack. Si votre joueur LAG vous 3bet à 7,5bb, vous pouvez call les 5,5bb pour un total de 18,75% de votre tapis. Le pot faisant alors au moins 15bb pour un stack restant de 32,5bb, le besoin d'équité est d'à peu prêt 40% et on le trouvera sur un grand nombre de flop. Comme la plupart du temps votre LAG voudra Cbet, il sera simple d'aller à l’abattage avec lui quand vous serez devant.

 

Créer son écosystème

Il faut tenter de créer les situations les plus favorables possibles pour avoir un winrate qui vaille le coup de jouer en short stack. Votre préoccupation première est de créer une situation idéale pour la main que vous détenez. Trouver le moyen le plus sûr d'aller à tapis préflop avec AA en vous appuyant sur un joueur qui 3bet énormément, ou relancer vous-même un limper en cherchant les as chez les joueurs qui parleront après vous, avec une main qui résiste bien à un 3bet comme TT88ss ou 8765ds. C'est la façon dont vous devez réfléchir, manipuler les adversaires et la table pour arriver à la situation optimale avec la main que vous détenez.

Deux autres paramètres doivent être intégrés pour se créer les conditions les plus favorables au jeu short stack. Le premier est la recherche des tables full ring, le second celui de la recherche des tables larges agressives. Le choix du siège est important également. Idéalement, on recherche à avoir un joueur agressif preflop comme au flop à sa gauche immédiate.

L'importance du jeu full ring, est liée à la question du prélèvement des blinds. Il sera d'environ 17bb toutes les 100 mains en full ring, contre 25bb en 6 max. Ces 8bb de différence sont bonnes, voir essentielles pour votre winrate. Les tables à 9 joueurs vous permettent aussi d'avoir plus de dead money, ce qui est doublement intéressant. D'abord bien sur par ce que ça fait de l'argent en plus quand vous remportez le pot, mais surtout parce que ça réduit le besoin d'équité de votre main. En effet si vous partez à tapis préflop en étant outsider, avec seulement 45%, vous serez à jeu s'il y a 10bb de dead money. Enfin, les pots disputés en multyway vous permettront de gagner des pots relativement énormes par rapport à votre stack de départ. C'est bon pour le moral et la confiance.

De son côté, le joueur agressif à votre gauche, est un grand fournisseur d'argent pour vous. Il vous servira de levier vous permettant de lui revenir dessus lorsque vous avez AA, mais ce maniak présente en plus l'avantage d'être un pourvoyeur de dead money, puisque beaucoup de joueur voudront payer sa relance préflop, mais passeront si vous relancez encore. En tout cas, il est la pièce centrale des pièges que vous pourrez poser à la table. 

L'introduction s'arrete ici. Elle ne fait que brosser rapidement les concepts de base et les idées générales qui soutentent une stratégie de jeu short stack gagnante. Mais elle devrait permettre aux joueurs qui souhaitent s'y essayer de démarer tranquillement avec les notions minimales pour s'en sortir. Pour dégager un jeu solidement gagnant en short stack, il faudra évidement approfondir le sujet, et travailler, comme pour n'importe quel autre domaine du poker.

 

Article écrit par 34badbeat34 (promotion article du mois)

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