Comment jouer avec un tapis de moins de 10 blinds en tournoi

Comment jouer avec un tapis de moins de 10 blinds en tournoi

Dans cet article technique, l'académicien WaitWaitW s'intéresse au jeu en MTT avec 10 blindes ou mois devant soi. Il ne sera pas question de range ici, mais une exposition de tous les paramètres à prendre en compte avant de faire tapis, ou payer un tapis. Article du mois écrit par WaitWaitW.


MTT : Le Jeu entre 0 et 10 bbs

C'est sans doute la phase la plus simple en tournoi, et pourtant elle mérite beaucoup d'attention, et demande aussi pas mal de travail. On va essayer aujourd'hui de décortiquer cette phase qu'est la phase très shortstack en tournoi. Par contre, on va toujours se considérer loin des places payées, paliers importants, ou autres facteurs qui vont ammener de l'ICM, parce que, faut pas déconner, c'est assez compliqué comme ça !

- Les options à notre disposition

On va distinguer deux cas : Lorsqu'on est premier à entrer dans le pot, et lorsque quelqu'un a déjà relancé (on va oublier aussi quand quelqu'un limp, et on va considérer sauf read particulier que c'est de la dead money).

A noter qu'à mon très humble avis, je pense qu'une stratégie parfaitement « GTO » intègrera pas mal de limps, particulièrement en s'approchant de 10bbs. Pourtant, je pense qu'il faut totalement prohiber le limp, puisque la grande faiblesse à la fois des regs et des fishs est de call trop tight les tapis (les regs ne veulent pas gamble et les fishs ne vont pas voir la cote ou la force relative de leur main et plutôt call selon l'envie, mais en général avec une fréquence trop faible) ; L'exploitation à avoir face à tous est donc de profiter du surplus de dead money, et donc faire tapis plutôt que limp. D'autre part on peut plus multitabler (une seule décision, un seul clic), on se fatigue moins l'esprit, etc.


CAS 1 : On fait tapis !!!

Tout d'abord, je ne vais pas donner de range précises, il existe pas mal de tableau assez faciles à trouver sur google par exemple (ceux qui veulent vraiment être maternés, tappez « jennifear chart ». Cependant, ce type de tableau est loin d'être optimal car il ne prend que les facteurs « primaires » de la main. On va donc essayer de voir exactement les avantages et faiblesses des différentes mains.

Voyons les critères de base que l'on prend en compte pour décider ou non de faire tapis :

-La position de héros
héros sera plus tight en early, plus loose en late position. A noter que sb est la meilleure position pour faire tapis, puisqu'une seule personne reste à parler et qu'on se fou totalement d'être hors de position quand le dealer va montrer les 5 cartes. La position va aussi changer le type de main avec lequel on fait tapis. En effet, en early, on va plutôt faire tapis avec des mains qui se comportent bien face à une range strong, puisque du fait du nombre d'adversaires, on sera confronté à des ranges plus strongs que si on attaque en late position. Par exemple, l'EV de 75s quand on est UTG sera à peu près toujours meilleure que celle de K2o, alors qu'au bouton c'est l'inverse qui se produit, les cartes hautes prennent le dessus sur la connectivité.

-Le tapis effectif
Ici, chose assez intéressante, on sera « relativement » tight avec très peu de blinds (entre 1 et 3 à peu près) du fait du manque de fold equity ; Progressivement, en gagnant de la fold equity, on peut attaquer plus loose, jusqu'à 8-9 bbs où on devra resserrer du fait du moins bon risk reward. Ici encore, les cartes qu'on va jouer vont être impactées par le nombre de blindes, non seulement en fréquence (le pourcentage d'open), mais aussi en type de main : on va chercher des mains qui restent fortes face à une range tight quand on aura beaucoup de blinds, donc des mains connectées, tandis que quand on aura peu de mains, on va privilégier la force brute de la main, donc la carte haute.

-Ses cartes
Bah oui, avoir un 7 est toujours mieux qu'un 1…

Tous les critères que je viens de citer nous donnent la chart dont j'ai parlé, qui donne les tableau de push « GTO » selon le nombre de blinds et la position. Mais d'autre facteurs sont impossibles à prendre en compte pour la chart :

-Le style des adversaires :
Même en position tardive, si on sait que les personnes à parler sont des serrures, on va avoir envie de modifier les mains qu'on joue, à la fois en fréquence et en type : on va bénéficier de beaucoup plus de FE, mais on va tomber quand on sera call par des ranges strong ! Adieu alors les K2o qui seront trop dominés, et rebonjour aux T6s qui se comporteront mieux en cas de call.

-Le tapis des adversaires :
Imaginons que j'ai 5bbs au bouton, la sb a 5bb et la bb a 5bb. Le tapis effectif sera donc de 5bb. Le range que l'on pushera sera-t-il le même que si on a 5bbs, que la sb a 16bbs et que la bb a 28bbs ? Il ne devrait pas en tout cas, car dans le cas 1 la sb peut call pour son tapis tranquillement, tandis que dans le cas 2 la sb doit se méfier puisqu'en callant, elle se commit contre la bb pour 16bbs. Son range sera plus tight et nous devons modifier notre range en conséquence. D'autre part, en MTT, le fait de jouer son tournoi ou non rend souvent les adversaires plus tights. Dans le cas 2, la bb pourra overcall relativement plus souvent la sb que si elle avait elle-même 15 bbs par exemple.

 

CAS 2 : On call un (des) tapis !!

Autant pour push, les ranges sont suffisamment « compacts » pour faire des charts (prendre plus de critère améliorera votre rendement, mais ce sera uniquement sur les décisions « closes » et ça restera une petite amélioration), autant pour call ça devient vite le bordel et il n'existe pas à ma connaissance de chart pour dire quoi call selon les blinds et la position. On va donc essayer de voir comment se dépatouiller pour devenir des CS sérieuses !

- La range de vilain
La raison principale pour laquelle il est impossible d'avoir des tableaux de call est celle-ci : la range de call qu'on a dépend énormément de la range de vilain. A blinds égales, si vilain push UTG 10 %, qu'on est en bb, notre range sera totalement différent que si c'est BT qui push ses 50 % de mains. Il faut donc vraiment s'attacher à lire au mieux la range du vilain qui a push, selon sa position et ses caractéristiques.

- La cote :
La cote du pot va nous dire si call notre main est un paris EV+ sur le long terme face à vilain.

- Le nombre de personnes à rester à parler :
Plus il reste de personnes à parler, plus on risque d'être « overcall », c'est à dire payé en plus par les adversaires derrière nous. C'est très important car ça modifie totalement l'EV du coup. Par exemple, tout le monde a 5bb, sans ante ; MP push nash (à peu près 30%). Si on veut call à l'équilibre, en bb on peut call 34 % de nos mains, alors qu'en sb on ne peut call que 23 %. Pire, au bouton on ne va call que 15 %. C'est plus de 2 fois moins ! Encore une fois, le fait d'être en mauvaise position va changer l'ordre de mains avec lesquelles on va faire tapis : on devra abandonner plus de cartes hautes offsuit que de mains suitée connectées dans notre range de call.

- Le stack des personnes qu'il reste à parler
Même si la cote offerte nous donne envie de call, on peut être obligé de fold : imaginaons par exemple un push en MP avec 5bbs; nous avons 15bbs. Si un ou des joueurs restant à parler derrière ont 10bbs+, on devra resserrer drastiquement notre range, bien que ce soit EV+ face au pusher : les gros tapis nous mettent plus en danger en cas d'overcall et font donc chutter l'EV de pas mal de mains.



Pour conclure, on peut trouver pas mal de logiciels pour s'entraîner à cette phase. Personnellement j'utilise ICMIZER, et je dois dire que j'en suis très content (j'essaierai de faire un article dessus tiens), mais il y en a d'autres, comme HRC, ou Simple Nash. Mais le plus important est de développer une sorte de feeling à force d'expérience, puisqu'on risque de manquer de time bank si on prend tous les critère en compte à chaque fois, et ne pas oublier que, plutôt que voir les mains de la plus forte à la moins forte, on devrait plutôt voir chacune des mains avec ses caractéristiques propres.
 

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