Article : "Retrouver le plaisir de jouer au poker pour la passion de ce jeu"

Bonjour à tous,

Après plus de 2 ans d’absence, je reviens sur PA pour un article ayant trait à l’approche que peuvent avoir du poker la plupart de joueurs réguliers, et comment il est possible de la changer pour une approche à la fois plus excitante et plus apaisée de notre jeu favori.

L’ambition de cet article est de permettre aux joueurs ayant connu « la belle époque du poker » de trouver un second souffle dans leur pratique de ce jeu.

Cette idée m’est venue car je constate que d’anciens gros « réguliers » du forum (peu nombreux pour l’instant), reviennent le fréquenter, simplement pour commenter des mains, comme par exemple @scorsese42 ou pour démarrer un nouveau challenge comme @krysal.

La première chose que j’aimerais amener « sur le tapis » si j’ose dire, c’est une réflexion sur la dichotomie « joueurs récréatifs » / « joueurs réguliers ».

A ma connaissance, dans aucune autre discipline, cette séparation franche n’est opérée.

Aux échecs par exemple, il y a des très bons joueurs, des moins bons joueurs, des débutants… Comme dans toute autre discipline.

Dans le poker, par contre, certainement car il s’agit d’un jeu où l’on peut gagner ou perdre de l’argent, les joueurs novices, ou simplement les joueurs qui jouent pour le plaisir, sont taggués « récréatifs » (qui restent une manière bienveillante de traduire « fish », ou « pigeon » en français).

Le problème de cette dichotomie est qu’elle exclut un peu toute pratique intermédiaire et « condamne » plus ou moins tout joueur qui s’intéresse au poker, à choisir entre :

  • S’investir un maximum en temps et énergie dans l’étude du jeu, aussi bien techniquement que mentalement, afin d’essayer de gagner le plus d’argent possible à ce jeu, car c’est le but « évident » pour tout joueur régulier.

ou

  • Être un joueur « récréatif » qui sera pris pour cible par les joueurs réguliers.

« Et alors ? » Me diriez-vous…

Et alors le problème est que cette dichotomie finalement enferme les joueurs qui se sont définis « réguliers » dans un « modèle de pratique du jeu » que je vais détailler. Ce modèle est une sorte de piège qui est particulier au poker et que les pratiquants réguliers de tout autre discipline ne connaissent pas… mais que beaucoup de joueurs réguliers de poker reconnaîtront.

On n’a jamais entendu un joueur passionné par les échecs dire quelque chose comme « Je ne gagne plus assez d’argent à ce jeu, ça ne vaut pas le coup, j’arrête ! »

Et pourtant au poker, bon nombre de joueurs passionnés arrêtent ce jeu ou simplement se découragent car ils se rendent compte qu’il ne gagne pas assez.

« Pas assez » par rapport à quoi ?

Leur référence est peut-être « l’âge d’or » du poker, autour des années 2008-2012… A une époque où en lisant un ou 2 livres et en réfléchissant un peu on pouvait gagner de l’argent aux tables plus « facilement »…

Mais en réalité, on peut simplement se rappeler que le poker est, pour tous les joueurs non professionnels, c’est-à-dire la plupart des joueurs dits « réguliers », en premier lieu une passion, un loisir.

Dès lors, on peut remettre la notion de « plaisir » au premier plan, et ne pas être en permanence dans « l’attente de résultats » qui au final est souvent contre-productive dans ce jeu, fortement soumis à la variance.

Cette nouvelle approche, je dirais même ce nouveau paradigme, peut permettre une relation plus saine avec sa bankroll, qui n’est plus un simple « outil de travail » comme j’avais pu l’expliquer dans mon article justement nommé [Article du mois] La bankroll est un outil et non un capital.

Cette notion « d’outil » laisse penser que l’unique but de notre pratique du jeu est de gagner de l’argent.

Et si nous pouvions considérer les choses autrement ?

Pour m’expliquer, je vais prendre un exemple simple.

Prenons un joueur régulier qui a joué un bon moment en NL25, il maîtrise parfaitement cette limite et il y est bien gagnant.

Il joue depuis plusieurs mois en NL50, il gagne, peu, cherche à faire progresser sa bankroll, qui monte finalement moins vite que quand il était en NL25 car son winrate théorique est très faible, et les badruns le ramènent souvent à la case départ…

Il essaie de « travailler son jeu », son mental, mais il lui semble que la NL50 est une limite qui est devenue très difficile à « crush », du moins avec le temps qu’il a à consacrer à l’étude du jeu.

A cette limite ou à une autre, je pense que beaucoup de joueurs se reconnaîtront là-dedans, car tôt ou tard, on finit par atteindre ce genre de « seuil ».

La plupart des « réguliers » vont, fidèles à leur plan, s’acharner à jouer, jouer, travailler, travailler, pour enfin crush cette fameuse NLxx. (NL50 dans mon exemple)

Mais enfin, qui nous a dit à la base que le poker était du « travail » ? Pourquoi ne pas considérer les choses tout à fait autrement, en se donnant des objectifs différents ?

Quel objectifs me diriez-vous ?
Eh bien, il suffit de reprendre les choses dans l’ordre, le poker étant un Jeu, reprendre le fait de se faire plaisir comme l’objectif numéro 1.

Ce qui ferait plaisir au joueur qui essaie de grind la NL50 et est juste breakeven, ça serait, par exemple, de pouvoir jouer en NL100.

Cependant, s’il constate après des mois voire des années qu’il est tout juste « break even » en NL50, il va peut-être finir par se lasser et soit stopper ce jeu qui pourtant le passionne, soit continuer d’y jouer mais avec un sentiment de « non-accomplissement » car sa roll ne parvient pas, malgré tous ses efforts, à la valeur qu’il lui permettrait de jouer sereinement en NL100.

Et si au lieu de cela, par exemple, il s’autorisait à scinder son « temps poker » en 2 :

Un temps où il va « grind » les limites qu’il crush (dans notre exemple la NL25) pour faire monter sa roll.
Et un temps où il va essayer de jouer en NL50 (ou même en NL100) dans un optique purement « plaisir », hors gestion de bankroll.

Ces passages « plaisir » en NL100, sur une période de temps limitée, ne seront pas vécus comme des « shoots » au sens où certains joueurs l’entendent : On « essaie » et on voit si ça passe (car dans la très grande majorité des cas, cela ne passera pas).

Mais ces périodes seront là surtout pour le plaisir de retrouver des sensations excitantes de poker. Peut-être sera-t-il « fébrile » et se fera-t-il exploiter par des joueurs plus aguerris. Et très certainement il sera perdant à cette limite. Mais il aura vibré et cela lui aura redonner l’envie de jouer à ce jeu. Et accessoirement cela lui donnera peut-être de l’expérience pour mieux jouer en NL25, voire en NL50.

L’idée est d’oublier cette envie de « shoot » la limite supérieure en espérant gagner du temps sur notre progression (car cela va sûrement au contraire nous en faire perdre). Pour envisager le « shoot » comme simplement un « petit extra hors BRM », qui est juste le fait d’utiliser de l’argent gagné sur les limites que l’on crush, pour prendre réellement du plaisir dans notre jeu favori.

Cette possibilité de « shoot » hors BRM peut également, paradoxalement, nous permettre d’avoir plus de patience dans le grind de notre limite habituelle et d’avoir moins de « besoin » de résultats en NL50 pour pouvoir « monter ». Cela peut conduire à un certain « détachement » de notre roll qui nous permettra d’être plus fort mentalement en NL50.

Cet article n’a pas pour but d’encourager des « réguliers » à devenir des « récréatifs » à des limites sur lesquelles ils n’auront pas la bankroll ni le niveau technique. Il vise juste à remettre l’envie du joueur au centre. Plutôt que de choisir nos parties uniquement en fonction de ce que nous dicte notre « gestion de bankroll », nous pouvons écouter nos envies, notre motivation du moment.

Cela peut-être jouer temporairement un peu plus haut pour se faire plaisir, mais aussi jouer plus bas pour crush et avoir plaisir à voir monter sa roll sans trop de swing.

A l’heure de l’IA, je vous propose d’oublier quelque temps, la simple progression dans l’étude du « jeu GTO ». Cette envie de jouer le plus parfaitement possible pour grimper les limites.

Pensons également à optimiser notre plaisir dans la pratique de ce beau jeu qu’est le poker !

La vie est trop courte pour pratiquer un loisir sans penser au plaisir avant tout…

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J’espère que cet article suscitera des réflexions, n’hésitez pas à poster vos commentaires !

Greg

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Et avec un nouvel avatar qui colle super bien à l’article. :wink:

En tout cas, ça valait la peine d’attendre. :+1:

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Salut,
Merci pour ton article très intéressant, je n’utilise que le mot récréatif et souvent avec un adjectif car tout est à relativiser, je suis d’ailleurs un récréatif et ma vision du poker a complètement changé.

Si je ne renie rien de ce que j’ai fait au poker mon approche a complètement changé, comme beaucoup j’ai fait des pauses plus ou moins longues, j’ai beaucoup travaillé hors tables les premières années et j’aimais ça, cela a déséquilibré ma vie car il faut toujours travailler plus et mieux pour progresser mais ça n’était pas mon job et même jamais dans mon intention pour des raisons personnelles donc j’ai fait un parcours jeu/ pause/jeu… et à un moment j’ai fait mon introspection en me posant toutes les questions possibles car c’est un jeu, un loisir où tu peux gagner ou perdre de l’argent.

J’ai tout mis sur la table entre ce que je voulais où pas, ayant touché un peu tous les formats la sélection s’est faite par élimination, j’aime toujours jouer au poker mais pas des heures et des heures même avec des résultats, j’aime toujours jouer au poker mais je ne veux pas faire beaucoup de travail hors table avec des outils GTO où jouer en mode auto, j’aime toujours jouer au poker mais seulement quand j’ai envie avec du plaisir sans contrainte et arrêter mes sessions quand je veux.

Avec ce bilan je suis donc un récréatif qui ne veut jouer qu’en exploitation, avoir du plaisir à jouer en étant honnête avec moi-même sur mon niveau de jeu car je ne joue pas tous les jours mon A-Game et les résultats des sessions ne se situent pas au niveau des € mais du jugement que j’ai de mon jeu et du plaisir et ça change tout car j’ai mis de côté le quantitatif pour le qualitatif. Je désactive toutes les animations sur les rooms et pas de trashtalk où d’échange sur le chat.

C’est beaucoup ça qui m’a amené à la réflexion, le plaisir du moment au présent tant qu’il est encore possible de jouer des humains car le poker en ligne tel qu’il existe ne subsistera pas, il va devoir se réinventer pour subsister la seule question c’est quand, comment ?

Mais je dois dire qu’en jouant peu de volume j’observe tout, chaque main, chaque sizing, qui fait quoi, le showdown… tout le monde a ses pastilles et des notes et je commence à noter certains doutes sur des pseudos associés, à tord où à raison d’ailleurs car je connais aussi les séries aléatoires. Et ces doutes sont à la marge pour le moment donc négligeables et ne concernent pas l’IA.

Donc oui profitons du présent pour prendre du plaisir au poker et ailleurs en restant positifs, on parlera de l’IA dans un autre sujet dédié car mon film préféré a un certain Hal… comme protagoniste. Et une pensée pour Hawking,Orwell, Huxley, Schrödinger.

chat-verre

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Salut @stratege85,

Je te remercie pour ta réponse intéressante et personnelle.

Effectivement, j’aurais pu également parler du fait de s’affranchir d’une espèce « d’injonction de volume » qui est quelque part présente lorsque l’on souhaite vraiment progresser au poker / ne pas être un « récréatif » (pour reprendre la dichotomie).

Il existe beaucoup de littérature sur la « gestion de bankroll » mais aucun à ma connaissance sur la « gestion de son temps de jeu » (si l’on excepte des conseils ou suivis particuliers concernant l’addiction).

Et oui, comme tu le soulignes, le plaisir peut avant tout être une affaire de mesure. Outre le fait de ne pas s’astreindre à jouer « toujours la même limite » en fonction de notre bankroll, on peut ajouter évidemment la liberté de « jouer moins pour jouer mieux » :wink:

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La plupart des joueurs « réguliers » sont techniquement et concrètement « récréatifs ». Même la plupart des joueurs gagnants sont « récréatifs ».

Le meilleur exemple c’est Phil Hellmuth, qui est à la fois un joueur récréatif, un fish et aussi un des plus gros crushers de l’histoire du poker, et 99% des « regs » qui pensent pouvoir s’assoir à sa table live en HU avec leurs théories GTO et espérer être EV+ long terme ont tort et sont largement favoris pour se faire défoncer pour des raisons qui sont pas expliquées sur les forums de poker lol

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Bonsoir @scorsese42 ,

Phil Hellmuth est d’enfer !!! :wink:

C’esu mon joueur préféré.

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C’est moi qui te remercie de rompre ton silence et d’avoir ouvert ce débat sur notre rapport au poker et le plaisir, mon chemin est singulier car j’ai suivi longtemps le troupeau pour faire comme tout le monde et j’ai commis plusieurs fois les mêmes erreurs et si je suis là j’ai changé de paradigme et appliqué au poker ce que j’avais déjà commencé à appliquer dans d’autres domaines.

Je n’ai pas besoin de gagner au poker pour vivre mais j’aime jouer au poker et j’y ai pris du plaisir mais pas toujours et avec le recul je vois à quel point j’ai été ridicule par moments devant mon écran en laissant un côté très sombre autodestructeur m’envahir impactant mon humeur et mon jeu aux tables et en dehors, j’ai honte de cette image de moi hors contrôle et j’ai envie de lui dire " va te défouler sur un sac de frappe si tu perds ton sang froid et ta lucidité, ce n’est qu’un jeu ! ".

Et pourtant j’ai lu Jared à cette époque mais comme le dit @Freudinou pour les raisons des échecs de certains de ses joueurs, ils savent mais n’appliquent pas !

Il n’y a pas de formule magique pour changer les choses et les imprimer mais à l’instar des mantras hors du contexte sacré chacun doit trouver ses bons outils.

Je peux dire que maintenant je prends plus de plaisir à jouer car je ne m’oblige à rien, je ne joue qu’avec l’envie de jouer et j’arrête quand je sens mon attention baisser et où je perds en lucidité, rarement plus d’une heure et surtout je ne me met aucune pression et je m’autorise parfois le plaisir d’aller titiller les limites supérieures.

Pour conclure, le poker est maintenant devenu pour moi un loisir comme les autres, c’est devenu un jeu de profilage et il est peu probable que je monte encore de limite avec mon jeu seulement en exploitation, mais ça me convient.

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Merci pour ton retour touchant qui correspond en parti au ressenti que j’ai sur ma propre expérience et dans lequel d’autres joueurs se retrouveront j’en suis sûr.

Suite à ton message, je suis tombé par hasard sur de plus vieux témoignages sur ce forum, de joueurs qui jouent sur « les limites supérieures » quand ils sont en tilt, « pour se refaire »… Qui est évidemment, dans ce cas, un comportement totalement destructeur…

J’en profite pour bien préciser que ce dont je parle s’adresse uniquement à des joueurs qui jouent depuis longtemps une même limite, qui ont suffisamment de recul sur le niveau de jeu et sur les différences de niveau entre les limites.

Bonjour,

thread très intéressant ,je pense qu’au bout d’un certain temps on a, pour une grande partie d’entre nous tendance à perdre de la motivation lorsque l’on stagne sur une limite.
Après cela peut etre « intéressant » de faire un shot sur la limite supérieure pour se redonner de la « motivation », de l’excitation, mais il faut le faire en quelque sorte de manière cadrée avec une autodiscipline(temps défini, blocage de limite encore supérieure ,type de jeu(expresso etc…) via les options du site.
A contrario cela peut etre destructeur pour sa BR si l’on est en phase de semi tilt/tilt, clairement!
D’ou l’interet de se définir des limites en guise de « garde fou » sur le soft.

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Je me reconnais totalement dans cet article : l’obligation de faire du volume, de travailler son jeu et la grande mode de travailler son mental.

Pour un joueur pro ou en voie de professionalisation dont le poker est la principale préoccupation, ça s’entend. Pour ma part avec un travail et une volonté de faire du sport à côté, ça devient mission impossible. Je me suis imposé un gros rythme à un moment, notamment en raison des différentes formations sur le mental (j’ai fait le PMS), dont l’optimisation du temps est un des piliers. Ca nuit complètement au plaisir.

Là, je me suis remis à jouer sans vraiment bosser mon jeu et sans me donner d’objectif de volume ou me créer d’emploi du temps poker. C’est tellement plus sain !

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J’ai écrit cet article en partageant ce qui était à la base une introspection, avec un ami qui est également « régulier » en cash game.

Je me doutais que d’autres personnes également se retrouveraient là-dedans :wink:

Bon retour Greg, on espère que la luxation de l’épaule ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir…

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J’ai suivi ton conseil et j’ai allin ma bankroll pour me faire plaisir en HU NL5000 et ça n’a pas marché. Le poker plaisir c’est vraiment pas ouf. D’un côté j’ai joué un pot à 10k ce qui était grave kiffant, mais d’un autre je l’ai perdu, c’était pas dingodingo, du coup maintenant je grind les free expressos sur winamax, :woozy_face:

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Je vois une incoherence. On peut pas tout avoir ma bonne dame.

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J’vais me refaire avec BLUFFCAT

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Reprends-toi en NL2, je pense que tu crush (il y a aussi cela dans l’article : préférer les limites que l’on crush aux limites BE), en environ 15.000 heures tu devrais récupérer tes fonds…

C’est le thread des reliques ici ?

J’suis un peu rouillé mais je vais faire chauffer la CB aussi

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