Les différents profils de joueur et le droit à l’erreur
Dans un article récent, j’ai parlé de l’importance de réhabiliter, pour nous même, le droit à l’erreur. Cette capacité à l’appréhender sous un jour nouveau, plus constructif, à se pardonner et en apprendre pour avancer dans la sérénité et la confiance est la marque des plus grands.
C’est souvent d’ailleurs ce qui différencient les joueurs qui progressent sur le long terme de ceux qui préfèrent rester dans leur zone de maîtrise, plus confortable émotionnellement, et qui finalement stagnent et se voient dépassés à terme.
A l’instar de Michael Jordan, Roger Federrer, Steeve Jobs, Phil Ivey ou Bien Alex Luneau, la recette de la réussite reviendrait à multiplier les tentatives, et par conséquent faire des erreurs pour construire son chemin vers la réussite. Une erreur serait ainsi un pas de plus sur cette longue route que peut représenter le succès, aussi subjectif soit-il et à définir selon ses propres termes.
J’ai ainsi montré comment le changement de nos perceptions de l’erreur pouvaient amenuiser le tilt, nous décomplexer vis-à-vis des tentatives échouées et maintenir notre dynamique d’évolution.
Pour autant en France, l’erreur est stigmatisée, poids d’un poids d’un essentialisme Platonien dans les processus éducatifs de l’Hexagone. Alors qu’elle devrait être considérée comme une étape normale et nécessaire du processus d’apprentissage. On pourrait plutôt l’encourager et l’accepter voire la célébrer comme un gage d’audace et d’expérience illustrant une tentative.
J’aime me rappeler régulièrement que la pire des erreurs est d’avoir peur de faire des erreurs et de ne rien faire. C’est J.K. Rowling qui disait : « Il est impossible d’apprendre sans échouer. A moins de ne rien faire et d’échouer par défaut ».
J’ai également analysé comment notre refus de l’erreur dépend en grande partie de nos perceptions qui peuvent être déséquilibrées voire erronées sur tout ce qui concerne la difficulté du poker, la compréhension de la variance ou de l’apprentissage.
Regardons plus en détails les différents profils de joueurs pour qui l’erreur reste une grande problématique et comment y remédier.
Ce déni de l’échec peut conduire à des conduites paralysantes traduites par 4 phénomènes : la procrastination, l’indécision, l’hyper-généralisation ou le perfectionnisme toxique.
QUATRE FACON D’AVOIR (TROP) PEUR DE L’ECHEC
Des biais cognitifs existent chez les joueurs qui se refusent à tout type d’erreur et préfèrent ne pas agir plutôt que d’échouer.
Le premier comportement caractéristique est celui de l’hypergénéralisant. Dès que ce joueur fait une erreur, le verdict tombe « je suis nul ! ». « Tout ce que je fais est nul d’ailleurs et a toujours été nul… ». L’erreur est vécue comme dramatique car elle renvoie à une vision très négative de soi-même. Le joueur ne juge pas uniquement son moove, mais toute sa personne en totalité. On voit ici l’impact d’une basse estime de soi sur l’appréhension de l’erreur et surtout sur les explications données à posteriori. Il généralise les causes de l’erreur et leur donne un statut permanent.
C’est Julian Rotter, psychologue émérite de la personnalité, qui a introduit en 1954 le concept de Locus de contrôle, qui décrit le fait que les individus diffèrent dans leurs appréciations et leurs croyances sur ce qui détermine leur réussite ou leur échec dans une activité particulière. Nous pouvons ainsi donner des raisons internes ou externes, permanentes ou ponctuels, globales ou parcellaires à notre échec ou réussite.
Les joueurs hypergénéralisants diront qu’ils sont nuls (global), qu’ils l’ont toujours été (permanent) et que c’est comme ça, c’est génétique, ils ne peuvent rien y faire (externe).
Un joueur plus confiant dira lui face à la même erreur, que sur cette main il n’a pas pris la bonne décision mais que globalement il est satisfait de son jeu (parcellaire), et que maintenant il réglera mieux son moove à l’avenir (transitoire), et que c’est de sa faute car il n’était pas suffisamment concentré (interne). La même erreur est commise mais le regard que ces deux joueurs portent dessus induira une réaction bien différente…
A suivre…