Joueurs de poker ou sportifs, qui gagne le plus ?

Joueurs de poker ou sportifs, qui gagne le plus ?

Foot, boxe, golf, tennis ou poker, quelle activité est la plus lucrative ? Les revenus d’un Phil Ivey sont-ils comparables à ceux d’un Tiger Woods ? Les semi-pros du poker sont-ils à plaindre en comparaison de leurs homologues sportifs ?

Le top des sportifs les mieux payés

Chaque année, le magazine Forbes publie son classement des stars du sport les mieux payées au monde. Les revenus des sportifs sont calculées à partir de trois sources : les gains en tournois, les salaires et la publicité (sponsors inclus).

Pour la saison 2013-2014, le sportif le mieux payé est le boxeur américain Floyd Mayweather surnommé “Money”. Il a en effet remporté 105 millions de $ pour deux combats et un total de 72 minutes passées sur le ring. (Oui, ça fait environ 18 mois de Smic par seconde) Il devient le deuxième sportif après Tiger Woods à franchir la barre des 100 millions annuels.

A la deuxième position nous retrouvons la star du Real Madrid, Christiano Ronaldo, qui a totalisé 80 millions de $ répartis entre 52 millions de salaire et 28 de publicités.

Le podium est complété par le basketteur LeBron James et ses 72,3 millions.

Franck Ribéry est le seul Français du top 100 avec quelques 18,3 millions de $.

La première femme, la tenniswoman Maria Sharapova, est 34ème avec 24,4 millions.

Le 100ème sportif le plus bankable de la planète est Luis Suarez (le classement était sorti avant la morsure de la coupe du monde) avec 17,3 millions.

Le sport le plus représenté de ce top 100 est le baseball avec 27 joueurs, devant le basketball (18), le football américain (17) et le foot (15). Ce classement des sports les plus rémunérés dévoile l’hégémonie des USA dans le sport business.

Le top des joueurs de poker les mieux payés

En 2013, année sans Big one for one drop, le joueur de poker qui a le plus gagné, d'après le site Hendon mob, était le vainqueur du Main Event des WSOP, Ryan Riess avec 8,4 millions de gain.

Le premier Français, Sylvain Loosli avait remporté moins de 3 millions.

La première femme, Vanessa Selbst a gagné quelques 2,7 millions.

Le 100ème joueur de poker a pris environ 840 k

Les chiffres paraissent éloquents, mais peut-on réellement les comparer ?

Gains des sportifs vs gains des joueurs de poker.

Dans un article de son blog, Alexandre Dreyfus donnait le poker troisième sport le plus rentable en 2013 avec 48 millions de $ de gain pour le top 10, derrière le tennis (49 millions pour le top 10) et le golf (52 millions pour le top 10).

En fait, il ne prenait simplement pas en compte les revenus publicitaires des sportifs. Ainsi, Tiger Woods qui a engrangé 55 millions de $ de pub, ne pesait plus que ses 6,2 millions de gains en tournoi. Autrement, il aurait gagné à lui seul plus que les dix meilleurs joueurs de poker…

Le rapport a la publicité est en effet une différence majeure entre joueurs de poker et sportifs. Autant il est facile de citer des sportifs qui ont fait des pubs pour le poker comme Sébastien Chabal et Raymond Domenech en France, autant il est presque impossible de citer des joueurs de poker ayant fait une pub hors poker.

Les grands joueurs de poker sont des inconnus qui ne sauraient être rentables auprès du grand public, pour au moins deux raisons principales.
1. Le poker est moins télévisuel que bien d’autres sports.
2. La variance fait qu’aucun champion ne peut se démarquer, hors le public adore ceux qui écrasent leur domaine. Beaucoup connaissent Tiger Woods, Garry Kasparov et Sébastien Loeb, sans avoir jamais regardé une compétition de golf, une partie d’échecs ou un rallye, car ces stars ont brillamment dominé leur sport. Tandis que même les joueurs de poker ne sont pas d’accord sur qui est le meilleur d'entre eux.

Mais même si l’on s’en tient aux salaires et gains en tournois, poker et sports physiques sont-ils comparables ?

Les sportifs sont des acteurs économiques d’un vaste système de richesses. Les joueurs de foot ont des salaires fixes payés par les droits télés, les ventes de places et produits dérivés, voire les aides des collectivités et mécènes. Le prizepool de Rolland Garros (1 650 000 au vainqueur et 24 000 pour les éliminés du premier tour) est financé sans qu’aucun joueur n’ait à payer de buy-in (bien doté, le freeroll…)

Alors que, faut-il le rappeler, le poker est un jeu à somme nulle (et encore, si on ne prend pas le rake en compte). Le joueur de poker ne créant pas de richesse, ce qu’ont gagné les uns correspond à ce que les autres ont perdu. C’est un gros biais du classement hendon mob, qui ne prend pas en compte les pertes des joueurs. Les gains, comme les pertes, en cash game, qui peuvent atteindre les 7 chiffres annuels ne sont d'ailleurs pas plus considérés.

En outre, les sportifs employés cotisent et peuvent toucher des aides en cas de chômage ou maladie, tandis que le joueur de poker ne peut compter que sur ses économies en cas de coup dur.

Pour autant, tout n’est pas si noir dans le poker.

Prenons l’exemple du tennis, dont la pyramide des gains est extrêmement abrupte. Roger Federer peut faire rêver avec ses +56 millions de gains (dont 52 de pub) mais il faut savoir que le 100ème mondial gagne dans les 300k et le 200ème joueur de tennis au monde prend dans les 20k annuels… auxquels il faut déduire frais (hôtels et déplacements) et impôts… Autrement dit, un joueur qui est 200ème sur plusieurs millions de pratiquants réguliers est un amateur ayant à peine de quoi financer sa passion. (Alors que le 200ème joueur de poker au monde doit être “un peu plus” que break even…)

Même au football, si l’on parle souvent de l’indécence du salaire d’un Zlatan, il faut bien comprendre que le joueur de foot pro moyen est quelqu’un qui va toucher 4000€ par mois en ligue 2 pendant une paire d’années avant de redescendre en National à 2000€ puis d'être contraint d’entraîner des gamins dans son village natal pour un smic.

Au poker il y a bien sûr la variance, mais dans le sport il y a le risque de blessure et la durée réduite des carrières.

Aussi, l’entraînement nécessaire pour avoir un niveau pro / semi pro est pour l’instant bien moindre au poker que dans les autres sports. Au poker, il est possible de commencer à 18 ans et de passer pro un an ou deux plus tard. Dans la majorité des autres sports, quelqu’un qui n’a pas commencé gamin et n’est pas allé au bout des fameuses 10 000h d’entraînement, n’a aucune chance de passer pro.

Enfin, rappelons la liberté offerte au joueur de poker, qui peut télétravailler en choisissant ses horaires. Le joueur de foot lui ne gagne pas d’argent quand il se fait une partie de FIFA...

En conclusion, si les meilleurs joueurs de poker gagnent nettement moins que les plus grands sportifs, les pros moyens et semi pros de poker n’ont pas forcément à être jaloux de leurs alter égos sportifs. Mais pour toutes ces activités, à l’exception des stars, vivre de sa passion implique une dose de risque et de précarité.

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