Cinéma, télé, comment le poker est devenu un spectacle ?

Cinéma, télé, comment le poker est devenu un spectacle ?

“Comment un jeu reposant entièrement sur la patience et la dissimulation a-t-il pu devenir un tel spectacle pour les médias ?” Le Grand Bain de France Inter pose la question. Du Kid de Cincinnati à Lucky You, en passant par Rouders, Casino Royal et les WSOP, découvrez les astuces utilisées, IRL et sur les petits et grands écrans, pour rendre le poker spectaculaire.

Poker à la radio : merci France Inter !

Après le Comme on nous parle du lundi 24 février consacré au poker, avec Gaëlle Baumann en invitée, c’est au tour du Grand Bain de médiatiser notre jeu. Les invités étaient Lionel Esparza, chroniqueur à France Musique et l’auteur du livre “L’esprit du poker” publié en 2014, ainsi que Laurent Vachant, scénariste et critique de cinéma.

 

Pour vous, je vais revenir sur la thématique abordée, à savoir : comment rendre le poker spectaculaire ?

Le poker au cinéma

Dans le cinéma hollywoodien, quand il n’est pas question d’amour, le but du héros est soit de devenir riche, soit de tuer son adversaire. Vu ainsi, on comprend l’attrait du poker pour les cinéastes. Seulement voilà, comment attirer le spectateur, qui ne comprend souvent rien à ce jeu reposant sur la patience et la dissimulation ?

Le Kid de Cincinnati

Ce classique de 1965 avec Steve McQueen dans le rôle titre a fortement contribué à la popularisation du poker dans les années 60/70. Le poker y est vu comme une métaphore des duels des westerns : les regards de tueurs sont filmés en gros plan champ/contrechamp, on y voit un plan macro sur une goutte de sueur qui perle sur le visage du héros… C’est du Sergio Leone avec des cartes à la place des flingues.

Le film utilise un procédé qui deviendra classique pour faire comprendre au spectateur du film ce qui se passe entre les deux joueurs silencieux : faire parler le public avec plans sur leurs visages.

Par contre, on ne commentera pas la probabilité d’une rencontre full vs quinte flush au 5-cards stud…

Rounders (Les joueurs)

Pour pour beaucoup de joueurs, Rounders est le meilleur film de poker. Matt Damon y campe un jeune étudiant, brillant dans ses études et au poker, qui replonge dans le jeu pour éponger les dettes de son ami (Edward Norton) après s’être juré d’arrêter quand il perdit sa bankroll contre un mafioso russe (John Malkovitch).

Ce film a forgé le poker tel qu’on le connaît (ou qu'on l'a connu) : on y joue au no-limit Texas Holdem, le héros regarde les WSOP en VHS, il cite des grands noms réels comme Johnny Chan et bien que l'action se déroule à New York, Vegas est la terre promise dont rêve le héros.

Tout au long du film et en particulier durant les parties de poker, Matt Damon parle en voix-off, décrivant au spectateur ce qui se passe dans sa tête et celle de ses adversaires.

Casino Royale

Alors que dans le roman de Ian Flemming, Bond jouait au baccara, le réalisateur a misé sur le poker pour ce premier James Bond version Daniel Craig. Sachant que le spectateur d’un James Bond vient toujours pour la même chose : de l’action, une jolie fille, encore de l’action et encore une jolie fille… imposer 20 minutes de poker était un pari risqué, finalement à moitié réussi.

Celui qui aime James Bond et ne connaît rien au poker ne doit en effet pas s’ennuyer durant ce tournoi entrecoupé de tentatives de meurtres, mais face à cette scène, les joueurs de poker hésitent entre rire et pleurer…

Finalement, il aurait peut-être mieux valu que le réal’ ne surfe pas sur la vague poker (on était en 2006) et que Bond joue bel et bien au baccara.

 

Lucky You

Lucky You est le premier film à montrer le poker moderne (enfin, juste avant le boom du poker en ligne). Si on parvient à oublier la faiblesse du scénario rempli de clichés, entre l’oedipien duel père/fils et l’histoire d’amour à l’eau de rose, on peut même (presque) passer un bon moment. Figurent en effet de nombreuses guest stars comme Doyle Brunson, Barry Greenstein et Sam Farha.

Le film nous plonge dans le Vegas de 2003, où évolue le héros, entre grind en cash-game et la table final du Main Event des WSOP. Là aussi, il vaut mieux ne pas trop faire attention à la probabilité des coups… (par exemple un flush vs straight flush en table finale) mais globalement, les scènes de poker sont compréhensibles par tous, sans artifice (même si ça parle beaucoup à table). On appréciera également la dédicace à Moneymaker : l’action se déroule en 2003 et le vainqueur du ME est un inconnu du web.

 

Le poker à la télé

C’est à Henry Orenstein, survivant des camps de concentration et créateur des Transformers, que l’on doit l’invention qui a révolutionné le poker à la télé : les hole cams, ces caméras qui filment les cartes des joueurs. C’est en 1999, pour l’émission Late Night poker, qu’elle furent utilisées pour la première fois. Ceci, couplé au fait que les tournois ne sont jamais diffusés en direct mais montés une fois les meilleurs moments sélectionnés, a révolutionné le poker à la télé. D’un jeu, reconnaissons-le, horriblement ennuyeux pour le spectateur, on a réussi à produire de longues émissions grand public. 

Mise en scène du poker IRL

Comme l’a rappelé Lionel Esparza lors de l’émission, les organisateurs aussi mettent leurs tournois en scène. Il donne ainsi l’exemple des liasses de billets apportées au début du heads-up des gros tournois. Sans trop de surprise, ce sont des faux, qui ne servent qu’au spectacle.

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